En France, la procédure de gestation pour autrui (GPA) est interdite par la loi. Celle-ci étant légale dans certains pays comme le Portugal, le Royaume-Uni, la Belgique, et certains états aux Etats-Unis, de nombreux couples se rendent à l’étranger pour devenir parents. Mais, de retour en France, ils se heurtent de fait à certains vides juridiques.
Statut juridique des parents d’un enfant né d’une GPA
La filiation d’un enfant né d’une GPA se compose du parent biologique et du second parent, dit “parent d’intention”. Jusqu’alors, ces parents d’intention n’étaient pas reconnus par la loi et devaient donc entreprendre une procédure d’adoption pour établir un lien de filiation avec leur enfant.
Le 4 octobre 2019, la Cour de cassation réunie en assemblée plénière a cependant pris parti en faveur de la transcription en France des actes de naissance désignant le parent d’intention, une position justifiée par “l’intérêt supérieur de l’enfant”. Cette solution a été rendue au regard des faits propres à l’espèce, et ne peut donc pas être généralisée. Il faudra l’intervention du législateur pour clarifier la situation et accorder un véritable statut juridique au parent dit d’intention. Aujourd’hui, seule est reconnue la filiation de l’enfant né par GPA avec son parent biologique, c’est à dire la personne qui donne ses gamètes pour concevoir l’enfant.
Qu’est-ce que la GPA ?
La gestation pour autrui est une méthode de procréation médicalement assistée. Elle peut être employée dans un cadre d’homoparentalité (couple d’hommes), ou lorsqu’une femme, dans un couple hétérosexuel, ne peut porter l’enfant pour des raisons médicales.
Concrètement, la GPA consiste à implanter un embryon issu d’une fécondation in vitro (FIV) ou d’une insémination dans l’utérus d’une mère dite “porteuse” qui remettra l’enfant à sa naissance à un couple demandeur, en abandonnant tout droit sur l’enfant. Seul le parent biologique pourra être reconnu, le parent d’intention devant adopter l’enfant pour établir une filiation.
On estime qu’environ 2000 enfants vivant aujourd’hui en France seraient issus d’une GPA. Mais de quoi s’agit-il exactement ?
Que dit la loi aujourd’hui ?
En France, la gestation pour autrui est prohibée par les lois de bioéthique de 1994. De ces lois est né l’article 16-7 du Code civil, qui dispose que “toute convention portant sur la procréation ou la gestation pour le compte d’autrui est nulle”. La GPA soulève en effet de nombreuses questions d’ordre éthique, notamment en ce qui concerne la marchandisation du corps humain. De fait, les enfants nés par GPA nés à l’étranger ne sont pas reconnus par le droit français.
Mais la jurisprudence en la matière ne cesse d’évoluer. En 2015, la Cour de cassation a en effet estimé que l’acte de naissance d’un enfant né à l’étranger par GPA pouvait être retranscrit sur les registres de l’état civil français en mentionnant son parent biologique. En 2017, elle a ensuite jugé qu’un enfant né d’une GPA à l’étranger pouvait être adopté par son parent d’intention. Enfin, le 4 octobre 2019, la Cour de cassation a jugé que les parents d’un enfant né à l’étranger par GPA pouvaient demander la transcription de l’acte d’état civil étranger s’il est conforme au droit local.
De fait, la Cour de cassation se prononce pour que le parent d’intention n’ait plus à engager une procédure d’adoption pour valider sa filiation avec l’enfant né d’une mère porteuse, ce qui ouvre une voie de reconnaissance du lien de filiation entre l’enfant et ses deux parents, qu’ils soient biologiques ou “d’intention”. Cette jurisprudence s’éloigne de la conception purement biologique de la filiation qui prévalait jusqu’ici, pour s’intéresser désormais à l’intérêt supérieur de l’enfant. La loi, cependant, reste inchangée.
La loi est-elle appliquée ?
Alors que, au terme des lois de bioéthique de 1994 qui interdisent la GPA, la naissance des enfants nés par ce procédé ne devrait pas être reconnue, la Cour de cassation a validé par un arrêt rendu le 18 décembre 2019 la transcription à l’état civil français de l’acte de naissance des enfants nés par GPA à l’étranger. Cette décision ouvre une possibilité pour la reconnaissance du lien de filiation entre l’enfant et ses deux parents, sans qu’il n’y ait nécessité pour le parent d’intention de lancer une procédure d’adoption. Il reste à voir si cet arrêt fera jurisprudence : en attendant, chaque famille devra faire l’objet d’un examen par le juge. L’assistance d’un avocat en droit de la filiation pourra permettre à ces familles d’entamer leurs démarches de reconnaissance des enfants nés par GPA.
Cela va-t-il changer ?
De manière logique, on peut penser que le législateur, après s’être prononcé en faveur de la PMA pour toutes les femmes en 2020, pourra se pencher un jour sur l’épineuse question de la reconnaissance des enfants nés par GPA. Si la légalisation de cette technique de procréation médicalement assistée n’est pas à l’ordre du jour, il est à espérer qu’une reconnaissance du lien de filiation entre l’enfant né à l’étranger par GPA et ses deux parents soit un jour entérinée par la loi. C’est en tout cas dans ce sens que va la jurisprudence de la Cour Européenne des droits de l’homme et de la Cour de cassation.